Le rituel des heures communautaires

Grâce à la longue déposition du célèbre berger de Montaillou Pèire Maury devant l'Inquisition, nous avons un précieux et très détaillé témoignage de ce que fut la vie de la communauté cathare des croyants exilés en Espagne, ainsi que celle de leur dernier Bon Homme Guilhem Bélibaste. Pèire fut probablement le croyant le plus intime du chrétien. . Nous devons nous rappeler qu'en temps "normal' participent aux heures communautaires les chrétiens et les novices, mais que pour Bélibaste, un des derniers Bons Hommes en exil, comme pour notre chrétien actuel, le Rituel communautaire des heures se trouvait et se trouve encore bien moins  "confortable". Voici ce qu'a retenu Pèire Maury de la pratique de Guilhem Bélibaste:

Citation :

Je l'ai vu prier de deux manières. D'une manière ordinaire, en se mettant à l'écart des autres quand il voulait prier. Quand il était un peu éloigné de nous, il faisait un tour, en se déplaçant en cercle et en levant les yeux au ciel. Et il inclinait alors la tête trois fois, et à la fin de cette prière il s'agenouillait et mettait la paume de ses mains sur le sol, puis il inclinait la tête jusqu'au sol, et mettait presque la bouche au sol. Puis, se redressant, il retournait auprès des croyants et leur disait: «Dieu vous bénisse», et les croyants, en inclinant la tête vers lui, disaient: «Benedicite, senher» . Et c'était là une manière commune de prier. 
Mais je l'ai vu prier jusqu'à dix fois d'une seconde manière, spéciale (à ce qui me semble pour le nombre de fois). Il mettait un banc, ou un oreiller, ou quelque chose de semblable, puis s'agenouillait fortement sur le sol, et mettait les mains sur ce banc en inclinant la tête vers le bas. Et il faisait de semblables génuflexions en grand nombre, et jusqu'à ce qu'il soit fatigué. Il le faisait parfois autant de temps qu'on met pour marcher un quart de lieue. Et quand il plantait ainsi les genoux à terre et mettait les mains sur le banc, il disait: «Adoramus Patrem et Filium et Spiritum sanctum». Quand il devait faire une prière de ce genre, il se mettait en tunique. Il le faisait quand il voulait se mettre au lit, et non pas ailleurs, à ce que je vis.

Cette dernière prière me semble correspondre aux complies, les «génuflexions» ou veniæ étant dans ce cas 14. 
C'est vraiment un témoignage très touchant que cette tranche de vie partagée entre croyants et chrétiens du Moyen -Âge. On les perçoit si fragiles et pourtant si affirmés dans leur foi. Le temps qui nous sépare n'est pas si long.

On remarque des différences notables dans les pratiques de Guilhem Bélibaste et celles que l'on retrouve chez les polémistes catholiques.
On peut imaginer que Bélibaste a, en quelque sorte, «adapté» sa pratique.
Cependant on y retrouve des éléments des rituels quotidiens habituels que j'ai décris dans un de mes textes.